Good wood revival

La Ferrari 250 GT SWB Breadvan, la cousine dissidente

Ce week-end, le grand rendez-vous du monde de l'automobile ancienne, c'est du côté de Goodwood pour le mythique revival. On y verra des autos qu'on ne voit nulle part ailleurs. Mais aussi des autos habituées des grands rendez-vous. C'est l'une d'elles dont on vous parle aujourd'hui. Une auto devenue mythique par sa forme si particulière : la Ferrari 250 GT Breadvan.

Préambule : le Comte Volpi et la révolution de palais de Maranello

L'histoire de la 250 GT Breadvan est liée à celle d'un homme : Giovanni Volpi, aussi connu comme le Comte Volpi. Né en 1938, c'est le fils du Comte Giuseppe Volpi di Misurata, riche financier de Venise, créateur du festival de Venise... et ministre de l'économie sous Mussolini. Il décède en 1947 et peu à peu, Giovanni va pouvoir bénéficier de la fortune familiale. Grand amateur d'automobiles, il acquiert des autos pour les faire courir. Quelques Cooper ou encore Maserati Birdcage sont achetées, mais son équipe, la Scuderia Serenissima, va surtout engager des Ferrari. Au début des années 60 c'est un client les plus importants de la marque au Cavalino Rampante. À la même période se dessine un événement important de l'histoire de Ferrari : la "Révolution de Palais". Les principaux cadres de la marque reprochent la gestion autoritaire d'Enzo Ferrari. Mais celui-ci ne veut pas entendre parler d'un changement d'organisation. Résultat : départ de ces fameux cadres. On parle tout de même de Carlo Chiti, Directeur Technique de la Scuderia, Romolo Tavoni, Directeur Sportif, et Giotto Bizzarrini ! Ils ne claquent pas la porte pour passer à la concurrence, ils veulent créer la concurrence. C'est comme cela que naît la marque ATS. Une monoplace, un moteur et une berlinette sont au programme. Et parmi les financiers, on retrouve le Comte Volpi, qui détient 20 % de la société. Cette situation ne dure d'ailleurs pas longtemps. Volpi trouve que les projets n'avancent pas. On lui lance alors un ultimatum : racheter l'intégralité de la société ou se retirer. Il choisit la seconde option. Revers de la médaille : il ne pourra pas engager d'ATS en course. Et pire, Enzo Ferrari a appris que le Comte Volpi s'était associé à ces putschistes. Pour marquer le coup, il annule sa commande de deux Ferrari 250 GTO. La Scuderiea Serenissima a toujours une Passo Corto, mais elle sait qu'elle ne pourra pas être à la hauteur de la future GT de la marque. Du coup, il faut trouver une solution, et ça va se faire en interne !

La naissance express de la 250 GT SWB Breadvan

Le Comte Volpi rachète alors la Ferrari 250 GT SWB 2819 GT fin 1961. C'est une auto qui vient de terminer deuxième du Tour de France Automobile avec l'Écurie Francorchamps et la paire Gendebien-Bianchi. D'ailleurs, il s'empresse de l'engager aux 1000km de Paris, sous ses propres couleurs, et elle y prend une belle troisième place. Maintenant, il va falloir la mettre à niveau. L'objectif est donc de battre - ou au moins d'accrocher - les 250 GTO lors de la saison 1962. Pour mener à bien ce projet, c'est un technicien déjà évoqué qui est mis à contribution : Giotto Bizzarrini. Le plus gros changement, le plus visible en tout cas, va concerner la robe de l'auto. Son aérodynamique va être revue avec une carrosserie réalisée par Drogo. On applique le principe du Kamm Back, avec un arrière haut et surtout à la coupe abrupte. L'avant est également effilé et plus pointu. Le tout est aussi plus léger que la carrosserie originelle. Cela lui donne un aspect "utilitaire" d'où son nom de 250 GT "Breadvan", qu'on pourrait traduire en "camion à pain" dans la langue de Molière.  Sous le capot, les changements ne sont pas minimes pour autant. Les trois carbus sont changés pour six Weber double corps ! La puissance grimpe à 300ch, on aura pas à rougir de la comparaison avec les GTO. S'ajoutent des changements d'implantation. On recule le radiateur et le moteur de 12cm  pour vraiment l'implanter en position centrale. En plus on va l'abaisser en utilisant notamment un carter sec. La répartition des masses est parfaitement optimisée. Seul "point noir", la 250 GT Breadvan se contentera de la boite 4 de la Passo Corto quand les GTO recevront une 5e vitesse. La nouvelle auto va être prête relativement vite et on est enthousiastes: 935 kg par rapport à la tonne de la GTO et une puissance équivalente devraient permettre de réellement se battre en piste. À noter également qu'elle n'est plus badgée Ferrari, mais uniquement Serenissima 

La 250 GT Breavan prend la piste

Les débuts de l'auto vont se faire aux 24h du Mans 1962. La paire de pilotes de la Scuderia Serenissima est composée de Carlo Maria Abate et Colin Davis. Pas de qualifications à cette époque, mais on sait que la voiture rapide et elle le prouve dès les premières heures de course. Tandis que la 330 TR1/LM se bat avec les grosses Maserati et l'Aston Martin DP 212 en GT, la 250 TR 61 de l'équipe Serenissima et leur 250 GT SWB Breavan font bonne figure au milieu du top 10. Las, elles seront toutes deux victimes de soucis de transmission, entraînant l'abandon, lors de la 4e heure. Après ces débuts remarqués, on verra finalement assez peu la 250 GT SWB Breadvan en course. Aux Guards Trophy, à Brands Hatch, Abate accrochera la 4e place, synonyme de victoire en GT. À la course de cote d'Ollon-Villars, même résultat. Scarfiotti et Davis se classeront 3e à Montlhéry lors des 1000 Km de Paris.

De la bête de course à la voiture mondaine

Volpi va utiliser la voiture comme une simple voiture de route ! Il utilise l'auto en 1963 pour parader devant l'Hôtel de Paris. Suite à quelques jeux d'argent, il prête l'auto à Giovanni Agnelli qui va l'utiliser dans la région... après l'avoir repeinte en noir ! Repeinte en grise, elle va reprendre la piste pour la course de cote de Gallenga Coppa où Edgardo Mungo prend une 9e place. Elle va ensuite partir aux Etats Unis où elle va passer de mains en mains. On lui appose des sigles Ferrari, et elle se fait remarquer dans les rues de LA. On va aussi voir à son volant quelques grands noms, venus se faire une idée de la conduite d'une telle auto. Elle sera engagée en courses historiques, endommagée puis massacrée lors d'une restauration où des panneaux en fibre viennent remplacer ceux d'origine. C'est en 2005 qu'on la retrouve chez Christie's qui ne parvient pas à vendre l'auto... mais elle change de mains malgré tout.  C'est à partir de ce moment qu'elle est envoyée à Modène, chez Sport Auto, pour une reconstruction complète. À partir de 2007, on va la revoir en courses historiques, que ce soit en Europe où elle est une habituée du Mans Classic (et des courses Peter Auto en général), ou à Goodwood Revival dont elle est une des plus célèbres engagées chaque année: elle s'y est d'ailleurs imposée en 2018. Dommage, cette année elle ne sera pas une des attractions du Revival puisque son équipage sera engagé sur une Type E Lighweight Lowdrag ! Facebook Instagram

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