Si la marque au lion a forgé sa réputation en rallye grâce aux deux titres remportés par la 205T16, il ne faut pas oublier qu’en 81, c’est une voiture du groupe PSA qui remporta le titre constructeur. Victoire par procuration, peut-être, la voiture étant née sous l’ère Chrysler, mais pas que, le soutien financier de Peugeot au projet ayant sans doute facilité cette accession au premier plan.
Quand Peugeot devient le nouveau propriétaire de Chrysler Europe en ce début 79, il trouve dans la corbelle de la mariée une Lotus Sunbeam prête à être lancée. Avec un moteur de 2172cm3 dérivé de celui qui équipe la Lotus Esprit, entre autres, il va évoluer pour passer de 150cv dans sa première version à 250cv, voir plus, pour les versions utilisées en compétition.
Préparées sous la direction de Des O’Dell à Stoke, mais aussi dans une nouvelle structure basée à Boulogne, les Sunbeam Lotus participent dès 1979 à quelques rallyes dont trois comptant pour le championnat du monde : San Remo, Tour de Corse et RAC.
Si dans la manche italienne, Tony Pond obtient une prometteuse 4ème place, JP Nicolas, doit abandonner en Corse sur accident après avoir remporté 3 spéciales et Tony Pond subit le même sort en Angleterre après 4 succès en spéciales. Début encourageant, mais il manque encore un rien de fiabilité pour décrocher une première victoire.
Pour la saison suivante, le programme est plus étoffé puisque les Talbot Sunbeam Lotus sont inscrites à 6 épreuves du championnat. Ce sont Guy Fréquelin et Henri Toivonen qui défendent maintenant les couleurs de Talbot. Si les premières manches se soldent souvent par un abandon sur accident ou problème mécanique, la 3ème place de l’équipage Fréquelin/Todt au Portugal offre à la voiture son premier podium.
Le meilleur reste cependant à venir puisqu’au RAC, dernière manche du championnat, Henri Toivonen l’emporte avec plus de 4 minutes d’avance sur Mikkola et sa Ford Escort, les 3ème et 4ème places étant prises par deux autres Talbot pilotées par Fréquelin et Brookes.
Toivonen/White RAC 1980. 1ère victoire pour la Talbot Sunbeam Lotus
La victoire obtenue en Angleterre laisse entrevoir une brillante saison 81 avec la secrète ambition de pouvoir jouer le titre, tant constructeur que pilote. Grande nouveauté, les 4 roues motrices font leur apparition au championnat du monde, Mikkola et Michèle Mouton ayant la lourde tâche de faire débuter les Audi Quattro au plus haut niveau.
Le programme de l’année est chargé car pour pouvoir courir deux lièvres à la fois, il faut participer aux dix épreuves comptant pour les deux championnats auxquelles s’ajoutent la Suède et le Brésil qui ne comptent que pour le titre pilote.
Talbot renonce cependant à participer aux deux rallyes africains (East African Safari et Bandama) jugés trop cassants et pas adaptés à leur voiture. Cette impasse les oblige à cumuler les bons résultats sur toutes les autres courses.
Au Monte-Carlo, épreuve qui ouvre la saison, Fréquelin termine à une belle 2ème place, devant s’incliner devant la maestria de Ragnotti vainqueur au volant de sa Renault 5 Turbo. Toivonen termine 5ème.
Renault 5 Turbo. Ragnotti/Andrié. Monte Carlo 1981
En Suède, terre de spécialistes, Fréquelin décide de ne pas y participer. Toivonen déclare forfait, sa voiture n’ayant pu être préparée à temps.
Au Portugal, c’est le finlandais qui ramène pour Talbot la 2ème place, Fréquelin terminant 6éme. Personne n’a rien pu faire face à Markku Alen et sa Fiat 131 Abarth.
Talbot Sunbeam Lotus. Toivonen/Gallagher. Rallye du Portugal 1981
En Corse, Fréquelin prend le relais en terminant 2ème derrière Darniche et sa Stratos. Toivonen a du abandonner.
Lancia Stratos HF. Darniche/Mahé. Tour de Corse 1981
A l’Acropole, rallye réputé pour ses routes cassantes, Fréquelin sauve l’honneur des Talbot en finissant 4ème. De nouveau, Toivonen rencontre des soucis mécaniques et ne voit pas l’arrivée.
C’est au rallye Codasur se déroulant en Argentine que Fréquelin va remporter sa première victoire pour Talbot. Toujours associé à Jean Todt, il devance la Datsun Violet GT de Shekhar Mehta. A ce rallye, tout comme au suivant, Toivonen n’est pas engagé.
Talbot Sunbeam Lotus. Fréquelin/Todt. Rallye Codasur 1981
Au Brésil, rallye ne comptant que pour le championnat pilotes, c’est Vatanen sur Ford Escort qui l’emporte, Fréquelin terminant sa tournée sud américaine par une 2ème place.
De retour en Europe, tout le monde se retrouve en Finlande pour les 1000 Lacs. Fréquelin sentant ses limites sur ce terrain très spécifique laisse sa place à Blomqvist qui fait mieux que de la figuration puisqu’il monte sur la 3ème place du podium. Personne n’a pu résister à Vatanen qui place sa Ford Escort RS1800 au premier rang.
Eord Escort RS1800. Vatanen/Richards. 1000 Lacs 1981
A 3 épreuves de la fin, rien n’est acquis au championnat du monde. Pour les constructeurs, Datsun, Talbot et Ford vont se disputer le titre.
Chez les pilotes, tout devrait se jouer entre Fréquelin et Vatanen, ce dernier se trouvant à 6 points du français.
En Italie, ce n’est pas la 2ème place de Toivonen qui va marquer les esprits, mais la victoire de Michèle Mouton sur son Audi Quattro. Pour la première fois, une femme remporte une manche du championnat du monde des rallyes.
Audi Quattro. Mouton/Pons. San Remo 1981
Au Bandama, c’est Salonen sur une Violet GT qui l’emporte. Mais si Talbot n’est pas présent, Fréquelin est bien là, engagé sur un coupé 504 V6. Bien lui en prend, sa 5ème place lui permet de prendre 8 points d’avance sur Vatanen.
Tout va donc se jouer lors de la dernière épreuve, le RAC qui se déroule du 22 au 25 novembre. Talbot est décidé à défendre ses chances en engageant 4 voitures pour Fréquelin, Toivonen, Blomqvist et Brookes. L’Audi Quattro de Mikkola l’emporte. Les Talbot vont connaître, elles, quelques problèmes. Moteur pour Toivonen, accident pour Brookes et Fréquelin, le français perdant à cette occasion le titre pilote car Vatanen termine le rallye à la 2ème place, coiffant, sur le fil, le français au championnat du monde. Blomqvist, sur la dernière Talbot Sunbeam Lotus encore en piste, termine 3ème et permet à Talbot de conforter sa première place au championnat constructeurs.
En 1982, Peugeot ne remet pas son titre en jeu, trop occupé à préparer sa prochaine arme : la 205 Turbo16.
En remportant ce titre, la marque française aura bénéficié du travail fait par Des O’Dell et son équipe. Peugeot aura eu le mérite de croire au potentiel de la Sunbeam Lotus et de donner aux équipes travaillant sur ce projet les moyens nécessaires pour rempoter le championnat constructeurs. Belle récompense pour les anglais de Stoke.
Crédit photos : Pinterest, Motorsport, Archives Talbot, warwickshire.org