Quand en 1963 Ferrari gagne une nouvelle fois le Championnat du Monde des Constructeurs, c’est de justesse que les voitures de Maranello réussissent à vaincre les surpuissantes Cobra. Celles-ci, se sont battues tout au long des manches du championnat mais ont du s’avouées vaincues, malgré des moteurs plus puissants que leurs concurrentes directes les GTO. C’est du côté de l’aérodynamique et de la rigidité que Caroll Shelby et son équipe vont se pencher avec l’espoir de faire mordre la poussière à l’écurie italienne et donner aux Etats-Unis un premier titre mondial des constructeurs en catégorie GT.
C’est fin 1963 que Carroll Shelby décide de se lancer dans la construction d’une version coupé de sa formidable Cobra. Il a bien vite compris que sur les circuits rapides, ses voitures à l’aérodynamique déplorable ne peuvent rivaliser avec les Ferrari GTO. Profitant d’un règlement très « laxiste », il planche alors sur la construction d’un coupé avec pour objectifs principaux, améliorer le Cx et la rigidité des futures autos.
C’est en moins de 90 jours que Shelby et son équipe réussissent le tour de force de sortir le premier coupé. Le châssis a été retravaillé et une carrosserie signée Peter Brock lui a été greffé. Même si le dessin ne fait pas l’unanimité, force est de constater que dès les premiers essais sur le circuit de Riverside en ce mois de février 64 toutes les personnes présentes s’accordent à dire que c’est une réussite. La voiture s’avère beaucoup plus rigide, la structure tubulaire supportant la carrosserie n’étant pas étrangère à ce gain de rigidité, et surtout, le coupé frôle les 300km/h en vitesse de pointe ; performance inenvisageable avec le roadster.
La première course se déroule à Daytona à l’occasion des 2000km. Même si cela se termine beaucoup trop vite, la voiture prenant feu lors d’un ravitaillement, elle a dominé tout le début de course. CSX2287 peinte en bleu a réussi son entrée et prend ce jour là le nom de Cobra Daytona.
Il ne faut pas très longtemps pour qu’elle obtienne un premier succès puisque c’est aux 12 heures de Sebring, un mois plus tard, qu’elle remporte la victoire en catégorie GT devançant pour l’occasion deux Cobra Roadster.
6 coupés Daytona sont alors produits. Contrairement au premier d’entre eux fabriqué entièrement aux Etats Unis, les cinq autres reçoivent leur carrosserie chez Grand Sport à Modène et sont livrés progressivement afin de rejoindre CSX2287 pour les manches du championnat du monde des constructeurs.
C’est aux 24hrs du Mans qu’une deuxième Daytona, CSX2299, se retrouve sur la grille de départ. Heureusement pour le Team Shelby puisqu’elle sera la seule à terminer la course à une magnifique 4ème place au général, Gurney/Bondurant se partageant le volant, avec, en prime, une victoire dans sa catégorie en devançant la GTO 64 de l’équipage belge Bianchi/ « Beurlys ».
Après un abandon à Reims, la Daytona confirme au Tourist Trophy en terminant 3ème au général loin devant la GTO d’Innes Ireland.
Malheureusement, le Tour de France Auto viendra anéantir tous les bons résultats obtenus depuis le début de la saison. Pourtant, tous les espoirs sont permis puisque ce ne sont pas moins de trois voitures qui sont alignées au départ. En effet, le châssis CSX2300 conduit par Bondurant/Neerspasch accompagne les deux châssis déjà prêts. Si le début de course ne fait que confirmer la supériorité des Daytona, le vent tourne rapidement et dès le troisième jour, les trois Daytona ont abandonné. Trintignant, en tête de la course, suite à un roulement de roue grippé, arrive trop tard à un contrôle alors que Simon doit se retirer sur un problème de piston. Bondurant/Neerspasch eux, ont du abandonner sur problème de transmission quelques heures plus tôt sur le circuit du Mans. Ferrari profite de la situation et ce sont deux GTO qui terminent en tête de l’épreuve, Bianchi l’emportant devant Guichet.
Même si le titre reste entre les mains de Ferrari, la victoire n’est pas passée loin pour les voitures de Shelby surtout si l’on prend en compte que pendant tout le début de saison une seule Daytona était apte à defendre les couleurs du team américain face aux nombreuses GTO.
Tout d’abord, l’année commence par un coup de tonnerre. Ne pouvant faire valider ses 250LM en GT et éprouvant des difficultés à homologuer à temps ses 275GTB Competizione dans cette même catégorie, Enzo Ferrari décide de faire l’impasse sur le champonnat du monde des marques en catégorie Grand Tourisme. Seules, les GTO privées se mesureront aux coupés Daytona qui, contrairement à l’année précedente sont maintenant en nombre.
Deux nouveaux coupés sont venus s’ajouter aux trois déjà présents en 64. CSX2601 et CSX2602 débutent à Daytona avec une belle 4ème place pour CSX2602 alors que CSX2299 termine deuxième au général et première en Grand Tourisme.
La saison continue au mieux pour les Daytona avec des victoires en GT à Sebring, Monza et au Nürburgring. C’est à Spa que la GTO de Sutcliffe devance la Shelby Cobra Daytona de Bondurant pour la première fois de la saison.
Un mois plus tard, aux 24hrs du Mans, tous les protagonistes se retrouvent avec une petite nouvelle. Un 6ème châssis CSX2286, le premier en n° mais le dernier prêt à courir, se présente au départ. Malheureusement, il ne verra pas l’arrivée, seule la voiture de Sears/Thompson sauvera l’honneur des Daytona en terminant 8ème au général.
Malgré une autre victoire en Grand Tourisme au Tourist Trophy pour la GTO de Sutcliffe ce ne sera pas suffisant à l’écurie italienne pour garder son titre. Le Shelby Team s’impose avec 19pts d’avance au classement final et devient la première équipe américaine à gagner un championnat du monde des constructeurs et à se hisser au niveau des équipes européennes, Ferrari en tête. Certes, on pourra toujours regretter que la Scuderia ne defende pas son titre elle-même et confié à des privés la lourde tâche de s’opposer aux Shelby Cobra Daytona mais il est sans doute probable que l’écurie italienne, qui avait déjà senti le vent tourner l’année précedente, ait préfèré s’abstenir plutôt que de se voir vaincue par une équipe américaine.
L’année suivante, la réglementation concernant les voitures pouvant courir en GT ayant évolué, ce sont les Mustang qui remplacèrent les Cobra Daytona. La carrière en compétition de ces dernières fut donc courte mais fructueuse. Aujourd’hui, les six coupés sont devenus des icônes au même titre qu’une GTO ou qu’une E Type Lightweight et font l’objet de célébrations comme celle à Goodwood en 2015 où elles étaient réunies pour fêter le 50ème anniversaire de leur titre.
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