Dans un virage, les roues d’un véhicule situées à l’intérieur de ce virage, parcourent un trajet plus court que les roues extérieures ; elles tournent donc moins vite. Pour les roues non motrices, qui sont montées libres sur leur fusée, aucun problème mécanique ne se pose. Par contre, pour les roues motrices, solidaires de deux demi-arbres recevant leur mouvement de l’arbre de transmission, il n’en est pas de même.
Si les roues motrices étaient fixées sur les extrémités d’un essieu entraîné en rotation par l’arbre de transmission à l’aide d’un simple renvoi d’angle, les deux roues tourneraient toujours à la même vitesse. De ce fait, dans un virage, la roue intérieure patinerait sur le sol, ce qui amènerait évidemment une usure rapide du pneumatique ainsi qu’une très mauvaise tenue de route.
Le renvoi d’angle nécessaire pour transmettre le mouvement de l’arbre de transmission aux roues motrices doit être complété par un dispositif permettant aux roues motrices de tourner à des vitesses différentes dans les virages, tout en restant soumises à l’action du couple moteur.
C’est ce dispositif que l’on désigne sous le nom de différentiel.
Cet organe est enfermé dans un carter étanche, prolongé latéralement par des parties tubulaires ou trompettes et constituant avec ces dernières le pont-arrière. Celui-ci forme un essieu rigide.
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Ce type de différentiel est le plus répandu.
Le mécanisme se compose de deux parties :
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Dans le “nez” du pont qui se trouve en partie antérieure du carter, tourillonne entre deux roulements l’axe d’un pignon conique appelé pignon d’attaque. Ce pignon engrène avec une couronne dentée appelée grande couronne, sur laquelle est fixée une sorte de cloche appelée boîte du différentiel.
L’ensemble tourillonne dans des roulements logés dans le carter.
À l’intérieur de la boîte du différentiel tourillonnent deux pignons coniques, appelés planétaires. Dans ce moyeu s’engagent les extrémités des demi-arbres moteurs sur lesquels sont montées les roues.
Sur un axe traversant la boîte du différentiel de part en part, sont montés fous deux pignons appelés satellites, qui engrènent avec les planétaires.
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Trois cas sont Ă distinguer :
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Ce cas se produit lorsque le véhicule roule en ligne droite ; l’adhérence des roues sur le sol étant la même de chaque côté.
Le pignon d’attaque, entraîné en rotation par l’arbre de transmission, fait tourner la grande couronne. La grande couronne entraîne avec elle la boîte ainsi que l’axe des satellites. Comme les résistances opposées par les planétaires (solidaires des roues) sont égales, les satellites n’ont tendance à tourner sur eux-mêmes ni dans un sens ni dans l’autre. Ils restent donc fixes sur leur axe qui les entraîne dans son mouvement et ils font tourner avec eux les deux planétaires.
L’ensemble fonctionne finalement comme si les deux planétaires et les satellites ne formaient qu’un seul bloc.
Les deux planétaires, et donc les deux roues, tournent à la même vitesse.
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Ce cas se produit lorsque l’une des roues se trouve sur un sol ferme et que la roue opposée patine.
Si la roue se trouvant sur le sol ferme est celle de droite, le planétaire de droite est alors immobilisé de par l’adhérence de la roue sur le sol et les satellites roulent sur le planétaire fixe et en tournant sur eux-mêmes ils communiquent un mouvement de rotation au planétaire de gauche.
Le planétaire de gauche ainsi entraîné tourne deux fois plus vite qu’il tournerait si les deux planétaires étaient libres.
Dans ce cas, toute l’énergie motrice est transmise à la roue qui patine et le véhicule n’avance pas.
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Ce cas se produit lorsque le véhicule effectue un virage mais aussi lorsqu’il est embourbé ou ensablé.
Le pignon d’attaque entraîne la grande couronne, la boîte du différentiel et l’axe des satellites.
Dans ce cas, si le véhicule effectue un virage à droite, la vitesse perdue par le planétaire de droite est transmise par les satellites au planétaire de gauche.
Dans ce type de différentiel, les planétaires sont à denture droite et les satellites sont remplacés par des pignons, également à denture droite, engrenant d’une part avec les planétaires et, d’autre part, entre eux.
Le principe de fonctionnement est identique à celui du mécanisme à pignons coniques.
Le planétaire de droite (D) étant freiné, le satellite (d) entraîné par son axe tourne sur lui-même et roule autour du planétaire freiné. Le satellite (d) fait tourner le satellite (g) à la même vitesse et les deux satellites transmettent au planétaire (G) la vitesse perdue par le planétaire freiné (D).
Note : Certains véhicules sont équipés d’un pont semblable mais dans lequel il existe deux couples de pignons droits donnant, en plus de celle du couple conique, deux réductions entre lesquelles le conducteur peut choisir suivant les conditions d’utilisation du véhicule.
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Sur certains véhicules gros porteurs, le rapport de démultiplication du pont devant être très petit, la grande couronne serait d’un diamètre tel qu’il nécessiterait un carter de très grandes dimensions. Pour éviter cet inconvénient, on emploie alors un pont à double réduction.
Le pignon d’attaque (A) entraîne une grande couronne (B) solidaire en rotation d’un pignon à denture droite ou oblique (C) engrenant avec un pignon semblable (D) ayant un nombre de dents plus grand et dont le fonctionnement est le même que celui d’un différentiel ordinaire.
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Dans le différentiel à pignons coniques, le prolongement de l’axe du pignon d’attaque passe par l’axe de la grande couronne. Les dents du pignon d’attaque et celles de la grande couronne sont droites et pour cette raison les flancs des dents se heurtent de front, ce qui rend l’engrènement bruyant. Pour supprimer cet inconvénient, des pignons de formes spéciales, à denture incurvée, sont utilisés. Ces couples sont le couple à denture hypoïde et le couple à denture palloïde.
Dans ce type de pont, le prolongement de l’axe du pignon d’attaque, et l’axe de la grande couronne ne sont pas dans un même plan. L’axe du pignon d’attaque est situé sous le plan contenant l’axe de la couronne.
De par leur forme particulière, les dents ont un engrènement plus progressif et plus silencieux que celles des pignons à dents droites.
Ceci dit, le couple hypoïde est assez délicat du point de vue de sa lubrification. En raison de la forme des dents, il se produit entre celles-ci un frottement de glissement important qui nécessite l’emploi d’huiles spéciales ayant une grande résistance aux pressions et aux frottements.
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Les dents du pignon et de la couronne sont incurvées de telle façon que leur portée augmente de plus en plus au fur et à mesure qu’augmente l’effort à transmettre.
Lorsque les dents sont en charge, elles portent les unes contre les autres par une surface importante de leurs flancs, ce qui réduit les pressions par unité de surface et, par conséquent, l’usure.
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Dans certains ponts, le couple conique est remplacé par une roue dentée ou couronne et une vis sans fin tangente.
La couronne est maintenue entre deux flasques qui constituent avec la couronne le boîtier du différentiel à l’intérieur duquel se trouvent les planétaires, les satellites et leur axe, semblables à ceux d’un différentiel ordinaire.
Les dents de la couronne épousent la forme de la vis, en vue de l’augmentation de la surface de contact. La vis est du type à filets multiples.
Dans une vis à filets multiples, les origines de ces derniers sont situées en des points équidistants, sur la périphérie du noyau, à l’extrémité de la vis. Les filets s’enroulent parallèlement autour du noyau comme le filet d’une vis ordinaire.
Le pont à vis sans fin permet un abaissement très sensible de l’arbre de transmission et par conséquent l’abaissement égal du centre de gravité du véhicule, sans qu’il soit nécessaire de ménager un coffrage ou tunnel dans le plancher.
Par ailleurs, ce type de pont a un fonctionnement très souple et très silencieux.
Comme les couples palloïdes, le pont à vis exige pour son graissage une huile spéciale.
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Le terme de “Pont” est souvent utilisé pour désigner l’ensemble du mécanisme différentiel. En fait, le pont est l’ensemble du carter reliant les deux roues motrices.
On peut distinguer deux types de ponts :
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Ce pont, appelé ainsi en raison d’une certaine analogie avec l’instrument de musique du même nom, est constitué de deux parties soudées entre elles et formant au centre un renflement ouvert sur sa face antérieure et sur sa face postérieure.
Sur l’échancrure avant se visse le support du différentiel après interposition d’un joint d’étanchéité. L’échancrure arrière, quant à elle, est fermée par un couvercle après interposition d’un joint.
Ce type de pont permet l’accès au différentiel après enlèvement du couvercle et la dépose du mécanisme différentiel sans qu’il soit nécessaire de déposer l’ensemble du pont.
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Le carter du différentiel est en deux parties prolongées chacune par un tube. Les deux parties ainsi constituées, ressemblent quelque peu à des trompettes musicales ; d’où le nom donné à ce type de pont.
L’inconvénient du pont à trompettes est qu’il faut le déposer pour atteindre le différentiel.
Quel que soit son type, le pont porte toujours des patins sur lesquels se fixent, à l’aide de brides, les ressorts de suspension. Aux extrémités sont fixés des plateaux sur lesquels sont boulonnés les flasques supports de freins.
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Un demi arbre est l’arbre qui transmet à une roue motrice le mouvement de rotation d’un planétaire.
Dans les ponts décrits précédemment, les demi-arbres peuvent être montés de trois manières différentes qui permettent de distinguer :
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Le demi arbre ne subit que des contraintes de torsion puisqu’il ne supporte aucune charge.
Ce montage est principalement adopté sur les véhicules utilitaires.
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L’arbre supporte à la fois des efforts de flexion dus à la charge du véhicule et des efforts de torsion dans la transmission du mouvement.
Le demi arbre est soumis Ă des contraintes de torsion dus Ă la transmission du couple propulseur, mais participe aussi au port de la charge et subit donc des efforts de flexion.
Le montage à arbres semi-flottants est très répandu sur les voitures de tourisme et sur les utilitaires légers.
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Les ponts vus précédemment constituent des essieux rigides dont le poids est évidemment très élevé. Dans le but de réduire le poids non suspendu que représente le pont-arrière et d’améliorer ainsi la tenue de route, certains constructeurs rendent le carter du différentiel solidaire du châssis.
Cette solution est appelée pont suspendu.
Le carter peut être fixé directement sur le châssis, ce qui est le cas lorsque le moteur est à l’avant du véhicule et que les roues arrière de celui-ci sont motrices. Le carter du différentiel peut aussi former un ensemble avec la boîte de vitesses et le moteur lorsque celui-ci est à l’arrière ou dans le cas des voitures à traction avant.
Quelle que soit la solution adoptée, les demi-arbres doivent être articulés afin de permettre aux roues de suivre les inégalités du sol.
L’avantage de ces articulations est que les roues peuvent être indépendantes l’une de l’autre dans leurs débattements, de manière que les mouvements en hauteur de l’une ne se transmettent pas à la roue opposée.
Diverses solutions sont adoptées pour transmettre aux roues motrices le mouvement de rotation des planétaires.
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Ce montage est aussi appelé montage à la De Dion, du nom du constructeur qui fut le premier à l’adopter. Chaque demi arbre est articulé par deux cardans : l’un à la sortie du différentiel, qui est du type suspendu et l’autre près de la roue.
Les deux roues peuvent être réunies par un essieu rigide ou montées aux extrémités de bras articulés sur le châssis.
Le système De Dion permet de placer les tambours de freins contre le carter du différentiel et de diminuer ainsi la masse non suspendue du véhicule.
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De part et d’autre du carter de différentiel, s’articulent par de fortes rotules, des demi-essieux tubulaires au bout desquels sont fixés les flasques de freins. Chaque demi-arbre moteur est articulé par un cardan logé à l’intérieur de la rotule, le centre de cette dernière et celui du cardan étant confondus.
La Renault 4 CV constitue une solution typique de ce montage.
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Sur les véhicules à traction avant, le moteur, l’embrayage, la boîte de vitesses et le différentiel forment un ensemble placé à l’avant du véhicule.
La boîte de vitesses est de conception particulière car les sorties de l’arbre primaire et de l’arbre secondaire sont du même côté. Le mouvement des planétaires est transmis aux roues par des arbres articulés. Cette solution permet ainsi la suppression de l’arbre de transmission assurant dans le montage classique, la liaison entre la boîte de vitesses arrière.
Par contre, l’entraînement des roues motrices pose un problème plus compliqué que dans le cas des roues arrière motrices. En effet, les roues avant, en plus qu’elles se déplacent dans un plan vertical sous l’effet des inégalités du sol, doivent pouvoir être braquées dans un sens ou dans l’autre sous l’action de la direction. En raison de ces mouvements des roues, on ne peut utiliser, pour l’articulation des arbres moteurs, de simples cardans.
Les articulations employées sont dites joints homocinétiques. Ces articulations transmettent le mouvement avec une régularité qui ne peut être obtenue avec des cardans ordinaires. Elles sont conçues sur le principe du double cardan.
Note : Si l’on considère deux cardans réunis par un arbre intermédiaire, l’ensemble des deux cardans ainsi réunis constitue un joint homocinétique, le second cardan corrigeant le mouvement irrégulier transmis par le premier.
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Article Ă©crit par Alexandre Degrandcourt
Crédits : Documents Berliet, Peugeot, Renault.