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Peter Collins : Des brumes anglaises à Maranello, parcours tragique d’un gentleman driver.

Peter Collins

Parmi les nombreux pilotes ayant couru en formule un dans les années 50, certains laisseront une marque indélébile, d’autres pas. Nul doute que Peter Collins est de la trempe des premiers. Le talentueux et charismatique pilote anglais aura, tout au long de sa brève carrière, marqué les esprits et ébloui tout ceux qui l’auront côtoyé.

Des premiers pas encourageants.

Peter Collins est né en novembre 1931 dans un milieu propice à toute personne désirant se lancer dans la compétition automobile. En effet, son père dirige une entreprise de transports et cultive lui-même un fort penchant pour l’automobile. Ses résultats scolaires pouvant être qualifiés de quelconque, le jeune Peter se retrouve rapidement à démonter et remonter des moteurs dans le garage familial. C’est suite à un premier rallye fait en compagnie de son père qu’il décide, avant même d’avoir son permis, de construire sa propre voiture, résultante d’un assemblage hétéroclite de pièces, châssis et carrosserie maison. Mais surtout, il réussit à convaincre son père, devenu concessionnaire Ford suite à la nationalisation des transports, de lui acheter une Cooper 500cm3.

Peter Collins

1949 sera une année d’apprentissage qu’il mettra à profit pour gagner à Silverstone puis à Goodwood, sa voiture bénéficiant d’une préparation maison. Les deux années suivantes ne feront que confirmer son talent de pilote et lui permettront de s’essayer sur différentes montures allant de la Cooper à la JBS en passant par une Dyna Panhard ou une Allard J2.

1952, le début d’une carrière internationale.

Ses brillants résultats lui ont permis de décrocher deux contrats de pilote d’usine. L’un chez HWM en Grand Prix, l’autre chez Aston Martin en voitures de sport.
Pourtant, c’est au Rallye de Monte Carlo qu’il débute l’année en terminant troisième de la catégorie 750/1100 cm3 associé à David Murray, futur fondateur de l’Ecurie Ecosse, au volant d’une Ford Anglia.

Sa saison en F1 est plus difficile. Il récolte quelques places d’honneur dans des épreuves hors championnat, mais n’obtient au championnat du monde qu’une 6ème place au Grand Prix de France à Rouen.
C’est au volant de sa DB3 en catégorie Sport qu’il remporte ses meilleurs résultats avec, notamment, une victoire aux 9hrs de Goodwood. 
Il réussit à se soustraire au service militaire obligatoire de deux ans grace à la complicité de David Brown le patron d’Aston Martin qui lui procure un job, quasi fictif, chez l’importateur de la marque en France ceci lui permettant de continuer à courir.
1953 sera la copie conforme de 52 avec une année en F1 décevante, les HWM ne pouvant rivaliser avec les Ferrari, mais fructueuse en Sport avec une victoire en fin de saison au Tourist Trophy.
Ce sera l’inverse en 1954. Engagé par Vanwall pour piloter la première voiture créée par Tony Vandervell, il trouve le temps de s’aligner en formule libre, la Vanwall n’étant pas prête à temps, et gagner plusieurs épreuves au volant de la Thinwall Special qui n’est autre qu’une Ferrari 4,5l boostée par Vandervell. Pour des raisons pas très claires, Collins signe chez BRM en cours de route pour travailler sur la future BRM P25. La voiture, en cours de développement, ne permet pas à son jeune pilote de gagner et s’est fâché avec Raymond Mays son patron que Peter quitte BRM. Cette même année sera très décevante en catégorie Sport, Aston martin étant incapable de proposer des autos performantes à ses pilotes, la multiplication des projets voulue par David Brown s’avèrant désastreuse en terme financier et temps pour développer sérieusement ses voitures.

Peter Collins

1955 sera pour Collins l’année de la reconnaissance de son talent aux yeux des teams managers qui comptent dans le sport automobile et tout particulièrement à ceux d’Enzo Ferrari. Mercedes en lutte avec Ferrari pour le titre mondial des constructeurs décide d’aborder la Targa Florio en se donnant les moyens de rafler le titre. Le constructeur allemand aligne trois voitures pour Fangio/Kling, Fitch/Titterington et, duo inattendu, Moss/Collins. Aston Martin ne participant pas à l’épreuve a autorisé son pilote officiel à faire une pige pour Mercedes. Après un début où Moss domine la course, il est victime d’une sortie de route qui endommage sa voiture et fait perdre plus de 7 minutes à l’équipage sur le duo Fangio-Castellotti en lutte pour la première place. Collins prend alors le relais et va faire une remontée fantastique, malgré l’état de sa voiture. Il réussit à reprendre la tête de la course avant de cèder le volant à Moss pour un dernier relais victorieux, son coéquipier argentin terminant deuxième donnant, grâce à ce doublé, le titre au constructeur allemand.

Peter Collins

Cap sur Maranello.

Cette course clef dans la carrière de Peter Collins n’est pas passée inaperçue du côté de Maranello et c’est tout naturellement que le « Commendatore » propose au jeune anglais un contrat qui se limitera dans un premier temps à la F1. En Sport, Collins reste lié à Aston Martin avec, quand même, la possibilité de courir sur Ferrari quand l’équipe anglaise n’est pas présente. Après un début de saison décevant se soldant par deux abandons, il gagne le Tour de Sicile sur une Ferrari 290MM, le photographe Louis Klemantaski officiant comme copilote. C’est le début d’une belle série puisqu’il va collectionner les podiums aussi bien en F1 qu’en Sport. Il termine ainsi 2ème des Mille Miglia sur une 860 Monza, 3ème à Syracuse sur sa D50 et à nouveau 2ème sur cette même auto à Monaco où il doit partager les points avec JM Fangio à qui il a été contraint et forcé de cèder le volant pour permettre à l’argentin de marquer quelques points au championnat. 

Peter Collins

Mais c’est quelques semaines plus tard, à Spa, que l’anglais va toucher au but en remportant en Belgique son premier succès en F1. Il remet ça au GP suivant, à Reims à l’occasion du Grand Prix de France où il devance Castellotti de quelques dizièmes. Ces deux victoires combinées aux podiums précédents le propulse en tête du championnat avec une avance confortable sur Behra et Fangio. Malheureusement, les courses suivantes, gagnées par l’Argentin, ne lui sont pas si favorables et c’est avec 8 points de retard sur son coéquipier qu’il aborde le GP d’Italie à Monza. Alors qu’il est est en 3ème position et que Fangio a du abandonner, il compromet toutes ses chances de victoire en championnat en s’arrêtant à son stand pour laisser son volant à celui qui est son concurrent direct pour le titre. Beaucoup de commentaires, de tentatives d’explications seront faits pour comprendre ce geste généreux. Collins se contentera d’expliquer qu’il ne se sentait pas en mesure de gagner et que, de plus, il était encore jeune et avait le temps pour remporter le titre.
Cette saison 56 sera pour l’anglais bénéfique sur plusieurs plans. Il a réussi à devenir incontournable dans le monde des GP et a su, par son état d’esprit et son charisme, devenir le chouchou du public et plus particuièrement de la gente féminine.

Pour 1957, Collins et Aston Martin se séparent d’un commun accord ce qui lui permet de signer un contrat chez Ferrari pour les deux catégories reines, F1 et Sport.
Il suggère aussi à Mike Hawthorn son ami de longue date, de signer pour Ferrari. Ils pourront ainsi faire équipe et combiner leurs efforts pour remporter le titre.

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Mais ce n’est pas sur le plan sportif que cette saison apportera le plus de satisfactions au jeune anglais. Il rencontre, avec StirlingMoss comme entremetteur, une jeune actrice américaine, Louise King avec laquelle il se marie une semaine après leur rencontre. Le voilà stabilisé dans sa vie privée ce qui devrait avoir une influence positive sur sa vie sportive. Ce ne sera pas tout de suite le cas, puisque malgré deux victoires à Syracuse et Naples, il doit abandonner au Mille Miglia, malgré une course splendide, aux 24hrs du Mans ou à Monaco. Il devra attendre le mois de novembre pour terminer l’année sur une victoire en remportant le Grand Prix du Venezuela à Caracas sur sa 335S associé à l’américain Phil Hill.

Peter Collins

1958 commence bien pour Peter, toujours associé à l’américain, il remporte les 1000 km de Bueno Aires ainsi que les 12 Heures de Sebring. Après un abandon aux 24hrs du Mans et une 5ème place au GP de France à Reims qui voit la victoire de Mike Hawthorn mais aussi la mort de son coéquipier Luigi Musso, il gagne de façon magistrale le GP d’Angleterre à Silverstone devant toute sa famille. Tout semble reparti pour Collins et la prochaine étape au Nürburgring pourrait annoncer une fin de saison à la hauteur de son talent.

Clap de fin sur la Nordschleife.

Peter Collins

C’est le 3 août 1958 que se déroule le GP d’Allemagne sur le terrible circuit du Nürburgring. 
Alors que la course se résume en une bataille dantesque entre Brooks sur Vanwall et les deux Ferrari de Collins et Hawthorn sur Dino 246, Collins sort de la piste à Pflanzgarten devant les yeux de son coéquipier avant d’être éjecté de sa voiture. Gravement blessé à la tête, il est évacué sur Bonn mais à son arrivée, les médecins ne peuvent que constater le décès du pilote anglais.


C’est ainsi que disparait à presque 27 ans l’un des meilleurs ambassadeurs du sport automobile. Adulé autant pour ses qualités de pilote que pour sa personnalité, il laissera un grand vide dans le monde de la F1. Sa disparition aura un impact direct sur Mike Hawthorm qui décidera à la fin de la saison, une fois le titre mondial acquis, de mettre fin à sa carrière de pilote, ne trouvant plus grand sens à continuer de courir alors qu’il venait de perdre son ami. Même Enzo Ferrari réputé pour être dur et froid avec ses pilotes fut affecté par la mort de son pilote qu’il considérait presque comme son fils et à qui il avait ouvert les portes de la « famiglia » Ferrari. 

Peter Collins

Sources : Classic Course
                Mercedes collection
                500 Races
                Le Guardian
                Ferrari collection
                Mon Ami Mate Chris Nixon  (incontournable pour tout savoir sur Peter Collins et Mike Hawthorn)

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