Au début des années 70, le haut de gamme à la française est symbolisé par la nouvelle Citroën SM, un coupé atypique flanqué d’un V6 produit par Maserati, alors propriété de la marque aux chevrons.
Le carrossier Chapron, basé à Levallois, dévoile au salon de Paris en 1971 le cabriolet SM Mylord. Sublime et luxueusement fini, il ne sera produit qu’à sept exemplaires. Suivra ensuite la SM Opéra, une berline à empattement allongé dont huit unités seulement furent livrées, dont la moitié au Général Franco en Espagne. Ce qui deviendra la SM Présidentielle est finalement un croisement entre les SM Mylord et Opéra.
Le successeur du Général de Gaulle, Georges Pompidou, est un grand amateur d’automobiles. En outre, il sait dès le début de son mandat qu’il accueillera la Reine Elizabeth II à Paris en mai 1972. La nécessité d’un cabriolet de prestige dans le parc de l’Élysée apparaît dès lors comme une évidence, le seul véhicule décapotable encore en état de rouler étant une vieille Talbot Lago T26 Record carrossée par Jacques Saoutchik. Hors de question de faire remonter les Champs Élysées à la souveraine britannique dans une vieille carlingue ! Pompidou exige donc une nouvelle automobile de parade, digne représentante de l’industrie française de l’époque.
Contact est donc pris avec Citroën à l’automne 1971. L’Élysée établit un cahier des charges qui est transmis au bureau d’études du constructeur qui, rapidement, se tourne vers Henri Chapron, seul à même de mener ce projet à bien.
Plusieurs projets sont alors envisagés, dont un landaulet et une berline allongée décapotable sur toute la longueur du toit. C’est ce dernier qui est retenu. Les ateliers Chapron optent pour une coque de SM, dont l’empattement est allongé de 52 cm et dont la partie arrière gagne 19 cm.
L’immense toiture amovible représente un sacré défi technique. Entre la nécessité d’offrir suffisamment d’espace aux coudes des passagers tout en réservant un emplacement à même d’accueillir le mécanisme particulièrement complexe de la capote, le travail fut difficile pour l’équipe du carrossier de Levallois Perret. Chapron est ainsi contraint d’élargir la coque du véhicule, dès les portes avant, jusqu’à la poupe du cabriolet. Le pare-brise est pour sa part rehaussé tandis que les deux portières avant sont raccourcies. Les ingénieurs parviennent à limiter l’embonpoint du modèle à seulement 300 kg, soit un poids total inférieur à deux tonnes.
Le modèle est équipé d’une superbe capote en cuir noir traité, un matériau que l’on retrouve partout dans l’habitacle du cabriolet. Une bonne dizaine de peaux, fournies par les Tanneries Costil, furent nécessaires pour recouvrir la sellerie ainsi que le mobilier qui équipent le modèle.
Trois exemplaires furent produits, dont deux livrés directement à l’Elysée. Montant de la facture présentée par Citroën à l’État français : près de 700.000 € pour chaque voiture. Les deux SM Présidentielles furent encore utilisées, ponctuellement, durant la présidence de Jacques Chirac.
Les SM Présidentielles sont encore en service et l’Elysée n’a pas prévu de les vendre aux domaines pour le moment, bien qu’après 36 ans la présidence puisse souhaiter un « char de l’Etat » répondant à des normes de sécurité plus actuelles.