Jacques Durand commença par fabriquer des modèles réduits à moteurs thermiques pour Vega au début des années 40. Puis il passa à l'échelle supérieure en 1958 pour construire des voitures à Anthony, avec l'Alta à mécanique Renault, et à Paris et Bordeaux avec la Sera à moteur Panhard. En 1961 il part à Barcelone avec comme projet l'Arista à moteur Panhard mais des problèmes administratifs arrêtèrent l'aventure espagnole. Toujours en Espagne il fabrique des accessoires pour René-Bonnet avant de rencontrer André Morin et de dessiner la Sovam...
En 1969 il part de chez Sovam et crée à nouveau sa propre marque: Jidé, venant des initiales de son propre nom. Cette fois la marque sera à vocation sportive contrairement aux premiers modèles. La production commence à Chatillon sur Thouet en 1969 mais elle la voiture n'est présentée officiellement, au Salon de la Voiture de Course, qu'en 1970. Les premières commandes arriveront grâce aux premiers résultats sportifs...
Le coupé Jidé est minuscule avec une longueur de seulement 3,59 m et une hauteur d'un mètre ! La ligne est trapue, tendue et s'inspire de celle de la Ford GT40. Comme tous les autres, il reprend des éléments de la série avec des phares de Matra 530 sous bulles, un pare-brise de Renault Floride mais cette fois-ci à l'endroit contrairement à la Sovam, des feux arrières et des poignées de portes de Renault 8. En 1970 le kit (la carrosserie, les portes, les capots, le châssis incorporé avec traverse avant Renault et le tableau de bord) était vendu pour 6300 Francs. Pour 10000 F, la voiture pouvait être livrée montée mais toujours sans moteur et train avant. Pour cela, il fallait dépenser 23800 F pour la version 1300 Gordini. L'accès à l'habitacle est très délicat du fait de la faible hauteur de l'engin et du câble d'acier incorporé dans la fibre et ceinturant le pare-brise et les portes. Il ne permet pas à celles-ci d'empiéter sur le toit. Une fois assis dans le baquet, avec les jambes décalées vers la droite à cause du pédalier, on se retrouve face à une instrumentation complète. La Jidé sera l'une des seules "kit-car" à avoir passé tout les tests d'homologation à l'UTAC (choc frontal, tenue de route, freinage, …) en 1972, impliquant la destruction de 2 voitures complètes. Tous les exemplaires construits jusqu'en 1973 auront une carte grise au nom de Jidé. C'est donc à partir de ce moment qu'elles recevront un numéro de châssis national au nom de Jidé (numéro à 6 chiffres partant du numéro 100). En 1973 le service des Mines n'accepte plus les Jidé et après un dernier passage collectif (environ 12 voitures), toutes celles finies après auront une homologation individuelle.
A part l'exception CG qui se fournira en moteur chez Simca, Jidé fait comme les autres et adapte ses châssis aux mécaniques Renault. Les moteurs sont tous en position centrale arrière mais reçoivent deux montages différents. La première proposition était d'avoir un des moteurs 1100 ou 1300 des R8 Gordini. D'une puissance de 88 ch DIN à 6700 tr/min, les performances du 1300 annoncées sont de 202 km/h, le 400m en 15,8 s et 1000m en 30s. Pour un prix de 23800 F, la Jidé est une sérieuse rivale pour l'Alpine A110 1300 v85 moins performante. Sur ce montage du moteur en position centrale, la boîte (à couple conique) devait être inversée par rapport à celle des R8, comme sur les Formule Renault. Pour l'anecdote, les trois premières Jidé 1300 ont reçu des moteurs achetés directement à Sovam.
La Jidé repose sur un châssis constitué d'une poutre centrale et de deux autres parallèles de chaque côté de section rectangulaire (60x40 mm) avec, à l'avant, une traverse de Renault 8 Gordini soudée et, à l'arrière, deux longerons recevant le berceau moteur. Il se révèle très rigide et fait de la Jidé un coupé très maniable grâce à son court empattement de 2,24 m mais au comportement assez neutre. Le châssis est noyé dans la résine afin d'être intégré à la carrosserie en polyester. Le train avant est celui d'une R8 Gordini avec une système Dangel de cames servant au réglage du carrossage et le train arrière est conçu à partir d'un train avant d'une R12 Gordini monté à l'envers et bloqué. A l'arrière de l'habitacle se trouvait un arceau contribuant à la rigidité et à la sécurité. Pour ce qui est de cette dernière un câble d'acier parcourait l'encadrement des portes et du pare-brise afin d'éviter la carrosserie puisse se disloquer en cas de choc et un caisson de sécurité interchangeable était monté à l'avant du châssis. Le freinage non assisté est à double circuit et reçoit des disques de Renault 16 TS à l'avant et de R12 à l'arrière. Le train arrière utilise un berceau amovible pour s'adapter aux deux montages différents, selon le type de moteur choisi. Pour les moteurs de la gamme R8, les éléments du train arrière étaient de provenance Renault alors que pour le second montage, avec des 1600, la suspension est à double triangulation avec des combinés ressort-amortisseurs. Les deux montages sont interchangeable sans aucune modification.
La Jidé s'étant révélée être douée pour la compétition (course de côte ou rallye), elle se devait d'avoir des moteurs plus puissants. En 1972 fut donc proposé de monter le 1600 Renault dans plusieurs configurations et, cette fois-ci, avec une boîte non inversée. La Jidé 1600 était équipée du moteur de la R16 TS développant 83 ch à 5750 tr/min. La Jidé 1600 S recevait quant à elle le 1565 cm3 des R12 Gordini de 113 ch à 6250 tr/min et 140 Nm à 4500 tr/min ainsi que sa boîte 5 pour 26600 F. La dernière version est celle développée pour la course, la 1600 S Compétition. Elle reprend le 1600 Gordini doté du kit 807 G à carburateur ou injection Lucas, développé par les ingénieurs de Renault-Gordini. Les modifications portent sur un nouvel ensemble chemises et pistons portant la cylindrée à 1596 cm3, sur la segmentation, les bielles allégées, l'arbre à cames, les bougies et l'admission. Tout cela permettait d'en 150 ch à 7200 tr/min avec l'injection Lucas. Les performances devenaient sensationnelles avec un 400m D.A. abattu en 13,1 s et le 1000m en 25s ! La jidé 1600S Compétition coûtait alors 51000 F, montée et préparée. En 1973, la Jidé reçu pour modification un spoiler intégré à l'avant, des ailes légèrement élargies, un aileron et des jantes plus larges. Les autres modifications esthétiques que l'on peut voir selon les modèles seront faites par les propriétaires eux-mêmes ou par les divers repreneurs après 1974. Petite anecdote : à l'image de son concurrent Jean Rédélé et ses Alpine A108, Jacques Durand vendit la licence de production de sa Jidé au Maroc où 9 exemplaires furent construits par la société Plastique Technique, basée à Mohammedia, spécialisée dans les coques de bateau. Hélas fin 1973, comme pour tous les autres petits constructeurs français, l'embargo sur le pétrole, la suspension des courses sur le sol français et les difficultés financières font que Jacques Durand vend la marque Jidé à Michel Baxas. Celui-ci ne produira qu'un seul exemplaire par la suite.
Les Jidé commencent à courir officiellement en 1969 au Tour de France automobile avec Patrick Champin et Pierre Madelaine. Jacques Durand n'aura jamais les moyens de faire officiellement de la compétition, c'est pour cela qu'il prêtera des voitures mais ce seront les pilotes qui payeront les engagements.En 1972, des 1600 S Compétition sont confiées aux mains de Jean Ragnotti, Henri Rimaudière (première victoire scratch au rallye du Poitou) et Michel Robini pour courir en rallye national (groupe 5), course de côte régionale et nationale et slalom jusqu'en 1974. La Jidé continuera sa carrière sportive avec le préparateur et pilote Georges Queron sur sa Jidé 1860 ou 1600 qui prendra le relais jusqu'en 1980, date à laquelle les Jidé passent en groupe N. En 1981, il couru avec une i2000, une Jidé élargie et allongée avec un nouveau châssis et un 2.0l de R20 poussé à 200 ch. Christian Alexandre et Charly Carcreff commenceront à courir sur Jidé en 1983 puis, en 1985, Charly Carcreff la remplacera définitivement par sa Scora Maxi. Christian Alexandre pilotera sa Jidé jusqu'en 2005.
Après la vente de Jidé, Jacques Durand s'installe en Corrèze pour y fabriquer des éléments en polyester. Mais ce sera plus fort que lui et une nouvelle voiture est mise en route. La Scora (Société CORrézienne d'Automobiles) présente son modèle au Salon de l'Auto 1974. Elle repose sur le même type de châssis que la Jidé, de dimensions légèrement en hausse et renforcé pour pouvoir encaisser la puissance des 2 moteurs proposés. Le premier est le 1600 Gordini porté à 160 ch pour 40000 F, voiture montée, et le deuxième est le 1800 préparé par JRD développant 183 ch DIN à 7200 tr/min. Entre 1975 et 1977, 9 Scora Type 1 (avec phares rétractables) et 7 Scora Type 2 (au dessin proche des Jidé, avec des phares sous bulle ) furent fabriquées avant que de nouveaux soucis financiers viennent arrêter la production. En 1982 Charly Carcreff achète la Scora de Michel Durand (le fils de Jacques) et court en rallye (groupe S). En 1988 il s'associe à Jacques Durand pour produire la Scora Maxi. Seuls 3 exemplaires sortiront de cette collaboration, munis du 1400 turbo des R5 Turbo en version Tour de Corse ou Maxi 5 de 350 ch. En 1990 Charly Carcreff continue l'aventure seul suite à des divergences et améliore la Scora au niveau de la direction (R21 Turbo), de la suspension (combinés réglables) et de la cellule. Il en fabriquera 9 exemplaires.
Jidé (montée) 1969-1974: 120 exemplaires
Jidé (kit) 1969-1974: 50 exemplaires
Jidé (Humeau) 1990-1993: 25 exemplaires
Jidé (Cosnefroy) 1994: 5 exemplaires
Scora (Durand) 1975-1977: 16 exemplaires
Scora Maxi (Durand-Carcreff) 1988-1990: 3 exemplaires
Scora Maxi (Carcreff) 1990: 9 exemplaires
La petite voiture de sport française va rester un casse-tête financier pour les passionnés téméraires qui vont se lancer dans l'aventure Jidé après son créateur Jacques Durand. En 1980, Jacques Herment crée le club Jidé et récupère les moules et l'outillage à Michel Baxas qui n'a plus l'argent pour continuer. Jacques Herment finit les quelques exemplaires encore restants et vend 6 kits et des pièces détachées. En 1990, Jean-François Humeau redépose la marque Jidé, ce qui lui permet de disposer des tests Utac, modernise certains éléments et construits 25 exemplaires jusqu'en 1993 avec un nouveau pare-brise de Citroën GS. Le coupé était alors vendu 150.000 F. Puis c'est au tour de Lucien Cosnefroy de reprendre la construction de 5 exemplaires et continuer à fabriquer des éléments pour les Jidé.
Source: Aurelien Rabbia et Automobile-sportive.com