Pour Lotus, l'année 1962 fut sans doute la plus importante de l'histoire de l'entreprise. En peu de temps, ils lancèrent la révolutionnaire 25 Grand Prix, première véritable monocoque et la révolutionnaire 26 ou "Elan", une voiture de route tout aussi révolutionnaire. Si la 25 a permis à l'entreprise britannique de remporter ses premiers championnats de Formule 1, l'Elan a confirmé le sérieux de la petite firme comme constructeur de voiture de sport. On pouvait pardonner au fondateur de Lotus, Colin Chapman, de ne pas avoir construit une version compétition de l'Elan. Cela n'a cependant pas empêché ses clients de prendre la piste avec leurs autos de série.
Bien que la voiture de série possédait une fabuleuse tenue de route et un poids plume, elle a dû être préparée pour la piste. Des équipes privées comme Walker Racing et Chequered Flag ont relevé le défi et apporté diverses modifications à la direction et au freinage. Chapman a suivi les efforts privés avec beaucoup d'intérêt et a même permis à ses pilotes d'usine de participer à la compétition Elans. Les saisons 1963 et 1964 ont connu un succès considérable et les autos furent pilotées par des pilotes comme Jim Clark, Jackie Stewart et Sir John Whitmore. En homme d'affaires, Chapman a rapidement prit conscience qu'il y avait un marché pour une version de course de la Lotus Elan construite par l'usine.
Chapman a retenu toutes les modifications apportées par ses clients. De plus, la suspension a été largement modifiée avec des barres anti-roulis plus épaisses et des wishbones de compétition réglables. Les passages de roues de la carrosserie en fibre de verre ont été élargis pour faire place à des roues et des pneus plus larges. Le moteur Lotus à quatre cylindres à double arbre à cames en tête était offert avec un ensemble de réglage Cosworth ou BRM. Il est intéressant de noter que les clients ont découvert plus tard que le moteur fonctionne mieux avec un bloc Cosworth et une tête BRM. Surnommée "Elan 26R", la voiture de compétition était proposée avec une carrosserie de Roadster, un arceau de sécurité et un toit rigide séparé. Bien qu'il n'y ait pas deux voitures identiques, la plupart des 26R sont équipées de phares carénés et de roues à quatre branches.
L'Elan 26R fut entièrement homologuée au cours de la saison 1964. La voiture de course pesait environ 600 kg et son 1558 cc pouvait produire entre 160 et 175 ch selon les réglages. Sa rivale la plus proche était l'Alfa Romeo Giulia TZ qui était très légère bien qu'un peu plus lourde et possédait également un puissant moteur de 1,6 litre. A l'image de David et Goliath, l'Elan de course était également capable d'égaler des autos à la cylindrée bien supérieure. Si les Ferrari, Aston Martin et autres Jaguar distançaient l'Elan en ligne droite, la petite Lotus n'en faisait qu'une bouchée dans les virages. L'Elan se montrait particulièrement efficace sur les pistes sinueuses ou à enchaînements rapides comme Goodwood.
Lotus n'a jamais engagé les 26R Elan sous sa propre bannière. Elle a en revanche soutenu les équipes privées, notamment celle de Ian Walker, qui avait grandement contribué au développement des voitures en premier lieu. Walker a déployé ses Elans dorées dans tout le Royaume-Uni mais aussi dans le reste de l'Europe. Avec plusieurs autres équipes, les Elan n'ont fait que dominer leur classe. Le pilote 26R le plus titré est le futur pilote Lotus F1 John Miles. En 1966, il remporta le championnat Autosport avec 15 victoires en course au volant d'une auto préparée par Willment. L'une de ses victoires les plus mémorables se déroula à Brands Hatch, contre une Sunbeam Tiger à moteur V8. Alors que son capot se détachait, et il fut contraint à un arrêt au stand. Une fois retiré, il remonta tout le peloton et dépassa la Sunbeam dans le dernier tour, au bout du suspens.
Avec beaucoup de voitures vendues aux clients sous forme de kit, il est difficile de donner un chiffre exacte quant au nombre d'Elan 26R produites. La plupart des experts de la marque s'accordent sur un nombre de 97 autos. Aujourd'hui, la 26R est toujours très populaire auprès des compétiteurs historiques qui font des étincelles au volant de l'Elan. Beaucoup d'Elan de série standards ont depuis été converties aux spécifications de la compétition, de sorte qu'il est parfois difficile de distinguer les vraies des copies.