La Porsche 968 à son apparition laissa les observateurs circonspects. Si on lui reconnaissait des retouches assez judicieuses lui permettant de s'intégrer dans la ligne stylistique du moment à Stuttgart (Porsche 911 type 964 et Porsche 928 Mk2), l'absence de modifications de la cellule de base provenant de la 944 ainsi que la reprise de l'habitacle à l'identique en surprit plus d'un. Pire, ses performances n'affichaient pas vraiment de progrès face à une 944 Turbo de 250 ch...
En apparence, la 968 n'est effectivement qu'un simple restylage de la 944. Mais aujourd'hui encore, la ligne de la 968 apparaît étonnament moderne ou presque alors que la 944 fait incontestablement plus désuète et "youngtimer" comme on s'autorise à dire dans le milieu. Le nouveau masque avant avec ses feux ronds façon 928 qui se redressent pour éclairer la route y est sans doute pour beaucoup dans la meilleure intégration de la 968 à la famille Porsche. La poupe est également plus lisse et ronde avec ses optiques oblongues fumées de rouge. Un petit aileron surplombe le hayon, héritage des 944 Turbo. Enfin, les boucliers type 964 chapeautent brillament la modernisation de la 944.
La version Club Sport reste fidèle à la 968 standard qui devient d'ailleurs la 968 "Luxe" à la commercialisation de la "CS". Ce qui change avec la CS, n'est pas que ses peintures flashies (blanc Grand Prix, jaune Vitesse, bleu Maritime, rouge Indien), mais surtout son assiette abaissée. Parfaitement bien posée sur ses jantes de 17 pouces de série, la 968 CS a belle allure. Pour ajouter au look sportif, ces dernières étaient peintes couleur carrosserie, sauf avec le noir. Petite exception à l'origine sur notre modèle d'essai donc, mais ce biton noir/argent personnalisé lui va à râvir ! Les rétros obus "Cup" et les poignées de portes sont peints de la même teinte que la carrosserie, tandis qu'un stripping "Club Sport" stylisé sur les flancs pouvait être apposé (option rarement choisie). Pas de doute, ainsi gréée, la Porsche 968 CS en impose visuellement et vient jouer des coudes auprès de la 964 RS.
Finalement, c'est l'habitacle qui illustre le plus la philosophie de cette 968 plus radicale. L'allègement d'environ 50 kilos a en effet été gagné au seul détriment du confort. Après tout, au diable le cocon douillet d'une GT pour aller jouer les dandys sur circuit ! Ainsi, de nombreux équipements électriques sont aux abonnés absents : vitres et rétros électriques, essuie-glace arrière, réglage de hauteur des phares. Porsche renie même sur la sécurité (ce qui est très rare) en retirant les airbags… En complément, la banquette arrière est restée au placard, les isolants ont maigri et deux vrais baquets Recaro (habillage tissu et coque peinte ton caisse) remplacent les douillets sièges en cuir de la version "Luxe". En option gratuite, on pouvait toutefois disposer des sièges "Confort", en tissu.
L'ambiance est sombre avec des tissus noirs et des habillages de porte repris des 944 S2 ! L'absence d'airbag conducteur autorise la psoe d'un petit volant trois branches aussi plaisant à l'œil que pratique à l'usage. Il est nettement plus dans le ton que le volant carré à gros airbag de la 968 Luxe... Cache bagages et autres petites broutilles sont également restées à l'usine pour participer aux économies. On quitte presque le monde de la GT pour celui des pures voitures de sport ! Bon, selon les bonnes habitudes de la maison, avec le jeu des options le client pouvait se faire une voiture sur mesure, comme par exemple prendre la climatisation ou même ajouter une banquette arrière (mais qui était différente de celle des 968 Luxe).
Le plus gros " quat'pattes " du monde ! C'est ainsi que l'on a surnommé ce moteur 100% Porsche (à ne pas confondre avec le quatre cylindres Audi de la 924). Plutôt que de céder aux sirènes du 6 cylindres, la Porsche 944 S2 avait adopté un quatre cylindres réalésé à 3 litres de cylindrée (2990 cm3 plus exactement). Ce bloc moteur, type M43/44, modernisé sur les 968, est conservé tel quel sur la 968 CS. Il ne faut donc pas confondre "CS" et "RS," car contrairement aux 964 RS dont le moteur gagnait quelques chevaux, la 968 CS ne profite d'aucune amélioration mécanique.
Toujours coiffé de sa culasse à 16 soupapes, ce moteur a été modernisé pour permettre autant une hausse des performances et de l'agrément tout en réduisant les émissions polluantes afin d'être présent sur les marchés aux normes antipollution les plus drastiques à l'époque (USA et Suisse notamment). La plus grosse évolution (comparé à la S2) est l'ajout du système VarioCam qui permet de jouer sur le calage de l'arbre à cames d'admission et d'échappement par rapport au vilebrequin. Ainsi avec ce système spécifique à Porsche, la 968 s'autorise une souplesse dès les plus bas régimes grâce à un couple de 27 mkg dès 2000 tr/mn tandis que le pic de 31,1 mkg démarre à 4100 tr/mn. Alors que la 944 S2 plafonnait (volontairement) à 211 ch pour ne pas venir faire de l'ombre tant aux 911 qu'à sa sœur Turbo, la 968 peut désormais revendiquer fièrement 240 ch à 6200 tr/mn. Compte tenu de la suppression de la climatisation dans la 968 CS, les motoristes de Zuffenhausen ont démonté le deuxième ventilateur électrique (sauf si option choisie).
Porsche ne change rien sur la transmission qui reste identique au modèle de série, à savoir la boîte 6 vitesses Getrag (Type G44/00), toujours disposée à l'arrière et reliée au moteur par le fameux système Transaxle. Précision et agrément caractérisent cette boîte manuelle disposant également d'un étagement idéal, ce qui n'a pas toujours été le cas sur les 944.
Lorsque le conducteur décide de passer à la vitesse supérieure pour voir ce que la CS a dans le ventre, il n'est pas déçu avec des performances aujourd'hui encore très honorables : autour de 7" pour le 0 à 100 km/h, un poil plus de 26" pour le kilomètre DA et une vitesse maxi de 252 km/h. Pas mal pour un atmo ! Des valeurs d'ailleurs qui sont équivalentes à celles d'une 944 Turbo, déjà plutôt bien lotie en la matière et qui lui permettent de donner du fil à retordre à sa grande soeur la 964 RS sur bien des circuits...
Descendante directe des Porsche 924 et 944, la 968 est toujours basée sur une coque autoporteuse entièrement galvanisée dont les panneaux d'aciers sont emboutis par le carrossier Karmann. L'avant conserve donc logiquement le principe des McPherson avec triangles inférieurs en aluminium et une barre antiroulis de 26,8 mm. L'essieu arrière est composé de bras semi-tirés toujours en aluminium pour réduire le poids, et d'une barre antiroulis de 16 mm.
Etonnament, le pont autobloquant (option M220) n'était pas livré en standard. Pour une voiture destinée aux "trackdays", on ne peut s'empêcher de crier à la radinerie, a minima... La 968 Club Sport se contente donc d'un châssis surbaissé de 25,4 mm avec des amortisseurs Koni plus fermes mais non réglables (sauf si option P030, voir encadré) et des ressorts plus courts (-20 mm).
Bien assise sur ses quatre jantes alu chaussées de pneus 225/45 ZR17 à l'avant et 255/40 ZR17 à l'arrière, la CS volant en main se montre très incisive et moins conciliante pour vos vertèbres. Bonne nouvelles pour vos bras et épaules, dans la lutte au dégraissage, la direction assistée hydraulique qui facilite le travail de la crémaillère est conservée, tout comme l'ABS pour le freinage. Un point d'ailleurs toujours aussi excellent chez Porsche puisqu'on retrouve des disques ventilés aux quatre roues. Les 2 disques ventilés avant sont d'un diamètre de 298 mm et pincés par des étriers fixes 4 pistons. L'arrière adopte des disques de 299 mm avec étriers fixes 4 pistons également.
Une fois à l'attaque sur circuit, la 968 CS se démarque très nettement de la version Luxe. Plus légère, plus vive, plus incisive, elle devient plus mobile lors des phases de freinage et de transfert des masses. Elle excelle toujours autant dans les grandes courbes par un équilibre qui frise le sans-faute, grâce à sa répartition des masses proche du 50/50 avec moteur avant et boîte-pont derrière.
Revers du durcissement du châssis dès que la chaussée se dégrade, elle devient plus sautillante et son train avant a tendance à perdre de sa précision en se baladant quelque peu. Un commentaire à relativiser car on parle là des limites de l'auto. Pour le commun des mortels qui n'a pas pour envie de faire des temps au tour absolument, une 968 standard suffit amplement et se révèle déjà une redoutable compétitrice et plus facile à conduire aux limites car plus douce en suspensions. Les dérives et glissades sont plus progressives. La 968 Club Sport va chercher ses limites avec autorité et ne respecte que la poigne de fer de son pilote au bord du décrochage. Jouissif, mais avec un minimum de connaissances.
Avec le retour en force des sorties circuits et une production limitée à 1538 exemplaires, la Porsche 968 Club Sport peut se targuer d'afficher une cote qui ne semble pas trop varier malgré les années qui passent. Comptez aujourd'hui un minimum de 15.000 euros, ce qui reste un rapport prix/performances très intéressant autant qu'un plaisir de pouvoir accéder à l'univers Porsche à prix raisonnable.
Evidemment, plus une auto a fait de sorties circuit, plus vous devez en tenir compte au moment de l'achat. Même avec un entretien très rapproché, l'usage circuit accélère le vieillissement des voitures, quoiqu'en disent leurs propriétaires. Bonne nouvelle cependant ces autos vieillissent très bien à condition d'être entretenues comme il se doit. Si l'auto convoitée semble en mauvais état, même avec un prix abaissé, la circonspection doit être de rigueur. Le prix des pièces Porsche est en effet pas donné et la facture peut vite grimper à des sommes peu raisonnables. Pour être certain de l'historique du modèle que vous souhaitez acquérir, la courroie de distribution devra être refaite tous les 60 à 80 000 km environ. Malgré son allègement, la 968 CS reste une sportive "relativement" lourde avec 1320 kilos à vide. En cas d'usage très sportif et intense (circuit notamment) certains accessoires et organes vieillissent assez vite comme la crémaillère, les silent-blocs et rotules, roulements. Les freins (disques et plaquettes) peuvent fondre comme neige au soleil et il ne doit pas être inquiétant de noter des remplacements fréquents tous les 20.000 km selon l'usage. Embrayage et amortisseurs commencent à fatiguer entre 60 et 90 000 km. Des organes à ne pas négliger et remplacer au bon moment pour éviter la dégradation du comportement et une usure plus prononcée de la commande de boîte de vitesse. On note sur certaines séries quelques problèmes de calorstat et de culbuteurs. Pas bien méchant, mais qui mérite de l'attention. Si la qualité perçue est supérieure à celle des 944, quelques accessoires électriques peuvent parfois se montrer capricieux. Mais on reste toutefois dans la rigueur germanique qui rassure, bien loin de la frivolité de certaines italiennes ou françaises.